Les Outils de la Liberté – Edito du Bourgmestre – Mars 2011

Mar 1, 2011 | Archives - Nos Valeurs

Les Tunisiens et les Egyptiens viennent de mettre fin au règne sans partage des présidents Zine el-Abidine Ben Ali et Mohammed Hosni Moubarak, respectivement au pouvoir depuis 23 ans en Tunisie et 30 ans en Egypte. Le monde arabe est, depuis lors, en ébullition et l’effet « domino » pourrait se poursuivre.

A l’heure où j’écris ses lignes, en Algérie et au Yémen, la population gronde. Le président yéménite Ali Saleh a déjà annoncé qu’il ne serait pas candidat à sa réélection en 2013 tandis qu’à Alger, les forces anti-émeutes s’emploient à disperser des manifestants de plus en plus nombreux. Pour tous les démocrates, l’heure est à l’allégresse.

Mais ces événements suscitent questions et réflexions : sur l’attitude des démocraties occidentales face à certaines dictatures, sur les régimes de transitions, sur l’éventuelle récupération islamiste ou encore sur la stabilité au Moyen-Orient. L’avenir est imprévisible et les points d’interrogation multiples.

Ce qui semble cependant certain, c’est le rôle indéniable qu’ont joué les nouvelles technologies de l’information dans l’ampleur qu’ont prise les manifestations. Bien sûr, les causes d’un soulèvement étaient réunies : un même pouvoir en place depuis plusieurs décennies, un appareil militaro-sécuritaire très répressif, des conditions socio-économiques difficiles, un taux de chômage très important chez les jeunes, l’absence de liberté d’expression, etc.

Mais ce qui a permis de donner de l’ampleur à la contestation en mobilisant durant des semaines des centaines de milliers de personnes, ce sont les réseaux sociaux comme « Facebook » et l’usage incontrôlé des téléphones mobiles. Les dictatures et leurs appareils répressifs driblés par la technologie du quotidien !

Incroyable… Les réseaux sociaux ont repris le rôle de la presse inféodée au pouvoir, pour dénoncer les despotes. Faut-il y voir l’aube d’une ère nouvelle, garante des libertés et de la démocratie, grâce aux progrès scientifiques ? Ne rêvons pas tout haut. La science n’a pas de patrie et les autocrates en place ou en herbe auront tôt fait de trouver les moyens de contrer ces nouveaux outils de libération. La lutte pour le maintien ou la conquête du pouvoir n’a ni frontière ni limite dans le temps. L’Histoire grouille d’exemples.

Mais ce qui me semble fondamental dans ces derniers bouleversements, c’est la détermination absolue des populations à briser leurs chaînes et à recouvrer leur dignité dans la maîtrise de leur propre destin. Cela peut prendre du temps et le prix à payer peut être lourd, mais tôt ou tard, l’homme qui veut être libre confectionne les outils de sa liberté.

Dans l’Info-xl du mois de septembre 2010, je consacrais l’éditorial au réseau « Facebook »et je le qualifiais, à l’instar de la langue d’Esope, de la pire et de la meilleure des choses. Dans ces révolutions du Jasmin et du Nil, c’est « la meilleure des choses » qui s’est exprimée. Réjouissons-nous.

Willy DECOURTY

Bourgmestre

Extrait de l’Ixelles Info de Mars 2011