« Sans terre, sans papiers… Mais pas sans coeur ! » – Edito du Bourgmestre – Octobre 2011

Oct 14, 2011 | Archives - Nos Valeurs

A l’heure où sonne la rentrée des classes et que le manque de places dans nos réseaux d’enseignement refait surface, je suis confronté à une nouvelle occupation illégale d’un bâtiment, dans la chaussée d’Ixelles. Un groupe constitué de « sans-papiers » afghans, de « sans domicile fixe », d’indignés a été rejoint par une centaine de Roms dont une quarantaine d’enfants !

Ceux-ci sont nés « étrangers » dans leur propre pays et n’ont jamais connu d’autre sort que le rejet, les a priori et le délit de « sale gueule » comme toute forme d’explication. La question de la scolarité des enfants se pose évidemment en d’autres termes. Ils n’ont jamais été à l’école et ne s’assoiront peut-être jamais derrière les bancs d’une classe. Ils vont d’un « squat » à l’autre, depuis leur arrivée en Belgique, pays de cocagne et terre d’accueil… Et, in fine, c’est le Bourgmestre d’Etterbeek qui les a mis dans un bus en direction de la commune de leur choix. C’est tombé sur Ixelles. Est-ce par hasard ?

Depuis 2002, nous sommes effectivement confrontés à des occupations illégales de bâtiments par des sans-papiers ou demandeurs d’asile. A chaque fois, nous avons mis tous les moyens en œuvre pour encadrer l’aide médicale, fournir des repas, faciliter les démarches administratives, etc.

In fine cependant, le sort de ces personnes dépend principalement de compétences relevant de ministères fédéraux. Les communes n’ont donc ni l’autorité pour traiter le problème à la source ni l’infrastructure pour accueillir, même temporairement, ces personnes. Nous ydéplorons donc que des pouvoirs locaux – sans aucune prérogative en matière de droit d’asile, de régularisation, d’octroi de permis de séjour ou de travail – soient finalement amenés à gérer des situations d’urgence et de détresse. Les bourgmestres sont en effet personnellement garants de la salubrité publique et de la sécurité.

Il va sans dire que les occupations sauvages répondent rarement aux exigences minimales des pompiers et de la police sans parler des grèves de la faim ou des problèmes de voisinage que ce type d’occupation génère inévitablement. La responsabilité des bourgmestres est donc souvent engagée et il nous faut alors concilier les impératifs sécuritaires et sanitaires, tout en veillant à trouver des solutions humaines et acceptables, au quotidien, pour ces personnes. Etre assis entre deux chaises, c’est rarement confortable.

Je n’ai cependant jamais demandé l’évacuation d’un bâtiment sans y être tout-à-fait contraint. J’ai toujours intercédé et mis tous les moyens en oeuvre pour traiter humainement les sans-papiers et autres réfugiés. Mais je constate qu’à chaque nouvelle occupation, se pratique le même « ping-pong » entre les différents niveaux de pouvoirs compétents.

Au fédéral, on se renvoie la balle des responsabilités, au niveau local voilà qu’on commence à se renvoyer des personnes et des enfants ! Qu’attend-t-on ? Un accident ? J’ai explicitement demandé la tenue prochaine d’une table ronde réunissant tous les acteurs concernés à tous niveaux, pour que l’on définisse, ensemble, une politique globale, pragmatique, complémentaire et qui tienne compte des impératifs humanitaires. Le « chacun pour soi » est l’expression égoïste d’une politique immanquablement vouée à l’échec. Ce n’est pas là ma philosophie…

Willy DECOURTY

Bourgmestre

Extrait de l’Ixelles Info d’Octobre 2011